3 février 2011 00h09
modifiée
3 février 2011 00h30

Segel
Voici pourquoi la mobilisation sur les retraites à foiré ...

Je voulais partager avec vous cette chronique du n°75 du journal La Décroissance :

L'article scanné :


La version OCR :

La grande manip'
La chronique d'Alain Accardo
La Décroissance - n°75 / Décembre 2010

Une fois de plus, la machine à berner les citoyens et à bafouer la démocratie a rempli son office. On peut même dire que le déroulement de la bataille contre la réforme sarkozienne des retraites aura fourni une illustration exemplaire de la façon dont, dans une ploutocratie à façade démocratique, comme la France, on s'y prend pour contourner la résistance du peuple. Le mécanisme de la manipulation est relativement facile à décrire.

Dès qu'un mouvement social de quelque envergure semble s'amorcer, les médias dominants, tous au service de la puissance capitaliste, entreprennent d'une seule voix, comme si cela allait de soi, de le confier aux bons soins des grandes centrales syndicales et de l'opposition de « gauche », dont les dirigeants sont rappelés à leur rôle de « partenaires sociaux » titulaires et responsables, seuls interlocuteurs autorisés du pouvoir. Ainsi donc, d'emblée, la communication institutionnelle se charge-t-elle de placer le mouvement sous le signe de l'œcuménisme républicain et d'excommunier toute démarche, toute mobilisation qui ne s'effectuerait pas sous la houlette officielle de l'épiscopat syndical. Quiconque aurait des velléités de manifester son opposition par un autre canal s'exposerait à être dénoncé comme un ennemi de la République, un extrémiste voire un terroriste, et se verrait privé d'accès à la parole publique.

Journées d'inaction
De leur côté, les hiérarques de la prétendue opposition politique et syndicale, forts du monopole de la représentation qui leur est reconnu, s'installent à la tête du mouvement pour y donner leur répertoire rituel. Le premier sketch, dit « de la feinte humilité démocratique consiste à jouer les serviteurs du peuple et à s'abriter derrière la volonté alléguée des gens de la base (« ce sont les salariés seuls qui décident »), ce qui permet de ne pas trop engager l'organisation. Si, comme ce fut le cas, on sent s'exprimer à la base une grande combativité, qui laisse augurer une mobilisation de grande ampleur et de longue durée, les directions passent au tableau suivant, dit « de la rodomontade », qui consiste à faire les bravaches (dans le registre « Nous n'accepterons jamais que... », « Nous sommes déterminés à aller jusqu'au bout » et « Si le gouvernement refuse de nous entendre, alors... »), tout en tempérant autant qu'elles peuvent l'ardeur de leurs troupes. À cette fin, le procédé le plus efficace, parce que le plus hypocrite, c'est de corseter le mouvement dans la camisole de l'agenda institutionnel, et de casser la dynamique offensive en subordonnant toute initiative aux échéances fixées par le pouvoir (rencontres avec des ministres, discussions au Parlement, déclarations du chef de l'État, etc.). L'ardeur des troupes étant ainsi constamment freinée par la pusillanimité des chefs, la grande bataille annoncée se réduit sans surprise à une succession de « journées d'action » consacrées pour l'essentiel à des défilés plan-plan, et de journées d'inaction consacrées à polémiquer stérilement sur le nombre des manifestants et à guetter les symptômes d'un essoufflement annoncé jour après jour par les médias.

Devant tant de mollesse et d'incurie chez des dirigeants visiblement vaincus avant de se battre, on ne sait plus s'il faut parler d'incompétence ou de connivence. Des deux sans doute, puisque la mascarade a, entre autres avantages, celui de ne pas bousculer les plans d'un PS qui préfère attendre paisiblement son retour aux affaires. Pendant ce temps le pouvoir poursuit imperturbablement sa sale besogne, pas le moins du monde impressionné par un mécontentement dont il sait n'avoir rigoureusement rien à redouter, assuré qu'il est du légalisme de « partenaires » acquis au respect inconditionnel du désordre établi, et du légitimisme d'un électoral trop borné pour comprendre qu'il est tombé dans la nasse où on voulait le faire entrer : une foule de gens atomisés, abêtis et domestiqués, qui se croient toujours des citoyens quand ils ne forment plus qu'une masse de manœuvre livrée aux manipulations politiciennes des deux fractions de la bourgeoisie régnante en concurrence pour le pouvoir.

Les moins pitoyables ne sont pas ceux qui, pour sauver la face, se donnent la satisfaction fantasmatique d'avoir « gagné la bataille de l'opinion » et se préparent à prendre leur « revanche » en 2012. En quoi faisant ? En élisant DSK qui milite inlassablement au FMI pour défendre les damnés de la Terre ? Parions que cette menace épouvantable fait déjà pleurer les banquiers... de rire.

3 février 2011 03h15

Djabali
quelque part, cela me fait penser à l'institutionnalisation de l'opposition par le régime égyptien depuis Nasser, sous la forme du mouvement des frères musulmans, opposition tellement molle qu'elle n'a pas été capable, en 60 ans, de susciter le vaste mouvement de protestation que nous voyons se déployer aujourd'hui. Un mouvement qui est né directement de la société civile, un mouvement qui ne veut ni temporiser, ni rogner sur ses revendications pour obtenir un accord au rabais.

3 février 2011 10h05

Segel
Orwell ... 1984 ... l'opposition fabriquée ...

3 février 2011 12h01

R.WOLF
c' est exactement comme ça que ça marche ; de un je salue la lucidité donnt fait preuve l' auteur, de deux à ceux qui se font prendre dans les pièges, je dirai, et bien vous êtes des crétins, assumez maintenant.

et c' est comme ça qu' on se trouve dans des dictatures orweliennes, des soi-disant démocraties, des démocraties coquilles vides.

je suis quelqu' un pas mal en colère pour le moment, pour des raisons personnelles mais aussi au vu de ce qui se passe, une façon dont j' ai de manifester ma colère est une indifférence glaciale, le mépris.
les gens ne sont pas innocents comme ils aiment le croire, ils sont pleinement responsables de ce qui est au fond de la paresse.
qu' ils se débrouillent sans moi, la compassion n' est pas mon fort.

3 février 2011 12h08
modifiée
3 février 2011 12h22

Segel
RED je savais que tu apprécierais l'article.
La Décroissance est un de ces petits journaux cinglants, qui ne fait pas dans la demi-mesure.
A l'instar de feu Le Plan B, Siné Hebdo et La Mèche ...

@jouté
A Noël j'ai offert 4 numéros de La Décroissance à 4 personnes différentes.

3 février 2011 12h19

R.WOLF
c' est le même ton, je ne supporte plus le soft.

j' ai d' autres chats à fouetter mais je m' abonnerais bien chez eux.

ceci dit, les gens ne se rendent pas compte de ce qui va leur arriver demain, de ce qui va arriver à leurs propres enfants, et de ce qui arrive déjà aux plus fragiles dans la société.

l' industrie de la distraction fait son boulot d' abêtissement et tout le monde de bêler en coeur.

en fin de compte, ils sont paresseux, ignorants, égoïstes. un chiffre qui m' a laissé songeur : manifestation Belgique - janvier 2011 /35 000 participannts / salon de l' auto Belgique - sur 10 jours / 350 000 participants.

moi, je dis messieurs dames, crevez! sans moi.

j' ai un discours radical voire insultant, parce que je suis lucide et excédé.
les gens n' ont que ce qu' ils méritent.
si la complaisance dans leur médiocrité leur plaît, sans moi les gars.

les mêmes qui tolèrent le renvoi par charters d' immigrés, les mêmes qui enjambent des sans abris. beurk!

3 février 2011 15h05

maurice
Merci Accurado bien vu article interressant.mais tant que l'état d'esprit ambiant n'évolura pas.Aucune Espérance de progrés collectif possible .Parce-que la france est bâti autour d'une structure corporatiste solidement ancrée .Même la pensée d'envisager de donner un coup de pied dans la fourmillière est inimaginable .Pays démocrate certe mais individuel et égoïste aussi .Corporation dans l'éducation nationale ,chez les énarques ,Dockers à marseille (C.G.T 12heures travaillé paye 3000 Euros par comparaison Pointe à pitre 7000 E (cf cour des compte )
oui pour dénoncer les abus mais chez le voisin

3 février 2011 15h23

Segel
N'oublions notre histoire.
Nous n'avons pas toujours été rongés par l'égoïsme.
La pensée libérale qu'on cherche à insuffler depuis 30 ans y est pour beaucoup.

3 février 2011 16h37
modifiée
3 février 2011 16h38

Hélène
....soupir.....
Et oui...le troupeau est bien manipulé....
Très bon article.

En mémo:

Les 10 stratégies de manipulation de masses



Le linguiste nord-américain Noam Chomsky a élaboré une liste des « Dix Stratégies de Manipulation » à travers les média. Nous la reproduisons ici. Elle détaille l'éventail, depuis la stratégie de la distraction, en passant par la stratégie de la dégradation jusqu'à maintenir le public dans l'ignorance et la médiocrité.

1/ La stratégie de la distraction


Élément primordial du contrôle social, la stratégie de la diversion consiste à détourner l’attention du public des problèmes importants et des mutations décidées par les élites politiques et économiques, grâce à un déluge continuel de distractions et d’informations insignifiantes. La stratégie de la diversion est également indispensable pour empêcher le public de s’intéresser aux connaissances essentielles, dans les domaines de la science, de l’économie, de la psychologie, de la neurobiologie, et de la cybernétique. « Garder l’attention du public distraite, loin des véritables problèmes sociaux, captivée par des sujets sans importance réelle. Garder le public occupé, occupé, occupé, sans aucun temps pour penser; de retour à la ferme avec les autres animaux. » Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »


2/ Créer des problèmes, puis offrir des solutions


Cette méthode est aussi appelée « problème-réaction-solution ». On crée d’abord un problème, une « situation » prévue pour susciter une certaine réaction du public, afin que celui-ci soit lui-même demandeur des mesures qu’on souhaite lui faire accepter. Par exemple: laisser se développer la violence urbaine, ou organiser des attentats sanglants, afin que le public soit demandeur de lois sécuritaires au détriment de la liberté. Ou encore : créer une crise économique pour faire accepter comme un mal nécessaire le recul des droits sociaux et le démantèlement des services publics.


3/ La stratégie de la dégradation


Pour faire accepter une mesure inacceptable, il suffit de l’appliquer progressivement, en « dégradé », sur une durée de 10 ans. C’est de cette façon que des conditions socio-économiques radicalement nouvelles (néolibéralisme) ont été imposées durant les années 1980 à 1990. Chômage massif, précarité, flexibilité, délocalisations, salaires n’assurant plus un revenu décent, autant de changements qui auraient provoqué une révolution s’ils avaient été appliqués brutalement.


4/ La stratégie du différé


Une autre façon de faire accepter une décision impopulaire est de la présenter comme « douloureuse mais nécessaire », en obtenant l’accord du public dans le présent pour une application dans le futur. Il est toujours plus facile d’accepter un sacrifice futur qu’un sacrifice immédiat. D’abord parce que l’effort n’est pas à fournir tout de suite. Ensuite parce que le public a toujours tendance à espérer naïvement que « tout ira mieux demain » et que le sacrifice demandé pourra être évité. Enfin, cela laisse du temps au public pour s’habituer à l’idée du changement et l’accepter avec résignation lorsque le moment sera venu.


5/ S’adresser au public comme à des enfants en bas-âge


La plupart des publicités destinées au grand-public utilisent un discours, des arguments, des personnages, et un ton particulièrement infantilisants, souvent proche du débilitant, comme si le spectateur était un enfant en bas-age ou un handicapé mental. Plus on cherchera à tromper le spectateur, plus on adoptera un ton infantilisant. Pourquoi ? « Si on s’adresse à une personne comme si elle était âgée de 12 ans, alors, en raison de la suggestibilité, elle aura, avec une certaine probabilité, une réponse ou une réaction aussi dénuée de sens critique que celles d’une personne de 12 ans ». Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »


6/ Faire appel à l’émotionnel plutôt qu’à la réflexion


Faire appel à l’émotionnel est une technique classique pour court-circuiter l’analyse rationnelle, et donc le sens critique des individus. De plus, l’utilisation du registre émotionnel permet d’ouvrir la porte d’accès à l’inconscient pour y implanter des idées, des désirs, des peurs, des pulsions, ou des comportements…


7/ Maintenir le public dans l’ignorance et la bêtise


Faire en sorte que le public soit incapable de comprendre les technologies et les méthodes utilisées pour son contrôle et son esclavage. « La qualité de l’éducation donnée aux classes inférieures doit être la plus pauvre, de telle sorte que le fossé de l’ignorance qui isole les classes inférieures des classes supérieures soit et demeure incompréhensible par les classes inférieures. Extrait de « Armes silencieuses pour guerres tranquilles »



8/ Encourager le public à se complaire dans la médiocrité


Encourager le public à trouver « cool » le fait d’être bête, vulgaire, et inculte…


9/ Remplacer la révolte par la culpabilité

Faire croire à l’individu qu’il est seul responsable de son malheur, à cause de l’insuffisance de son intelligence, de ses capacités, ou de ses efforts. Ainsi, au lieu de se révolter contre le système économique, l’individu s’auto-dévalue et culpabilise, ce qui engendre un état dépressif dont l’un des effets est l’inhibition de l’action. Et sans action, pas de révolution!…


10/ Connaître les individus mieux qu’ils ne se connaissent eux-mêmes


Au cours des 50 dernières années, les progrès fulgurants de la science ont creusé un fossé croissant entre les connaissances du public et celles détenues et utilisées par les élites dirigeantes. Grâce à la biologie, la neurobiologie, et la psychologie appliquée, le « système » est parvenu à une connaissance avancée de l’être humain, à la fois physiquement et psychologiquement. Le système en est arrivé à mieux connaître l’individu moyen que celui-ci ne se connaît lui-même. Cela signifie que dans la majorité des cas, le système détient un plus grand contrôle et un plus grand pouvoir sur les individus que les individus eux-mêmes.

3 février 2011 16h48

Segel
Je connais bien sur cette liste.
C'est presque mon livre de chevet, à l'instar de Machiavel pour Mitterrand.
Non pas pour m'en servir, mais pour savoir quand on cherche à me manipuler.

3 février 2011 16h51

Hélène
Pas mieux Segel...j'ai souvent cette liste en tête aussi.

3 février 2011 17h01

Segel
Mais là, ça va plus loin, puisqu'il s'agit d'opposition fabriquée et servile.
On est en plein dans 1984 là ...

4 février 2011 09h11

Hélène
Oui, Ça me fait penser aussi à "V pour vendetta" pour la manipulation médiatique....

4 février 2011 18h30

R.WOLF
Je ne sais pas si d' Orwell lui même, mais je crois que oui, il y a une phrase qui dit : 1984 n' est pas un roman mais un programme politique.

Donc ..

2 juillet 2012 01h32

Segel
Maintenant que le PS a tous les pouvoirs, on va bien voir si quelque chose bouge au niveau des syndicats.

Ca m'a pas vraiment l'air d'être parti pour.

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